Pourquoi le taux de suicide en Corée du Sud est-il l’un des plus élevés au monde ?

Suivi depuis des années par l’étiquette du « pays le plus touché par le suicide », la Corée du Sud connaît désormais une nouvelle évolution à la hausse de ses cas depuis 2020 avec la pandémie du coronavirus. Décryptage.

Première cause de décès chez les jeunes

Sur l’année 2019, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) recensait près de 13 799 personnes ayant commis un acte de suicide dans le pays, soit l’équivalent de 37,8 personnes par jour. Si ces chiffres paraissent énormes, le constat ne reste néanmoins pas étonnant si l’on considère qu’il s’agit de la première cause de mortalité chez les jeunes, de 10 à 29 ans (en grande majorité) et plus généralement chez les moins de 40 ans selon un rapport publié par Statistique Corée (Kostat). 

La société coréenne, très réputée pour son côté strict et standardisé, laisse planer énormément de pression sur les épaules des plus jeunes et notamment dans le milieu scolaire. Dès leur plus jeune âge ces derniers se préparent tous à une seule et même chose : l’examen national d’entrée à l’université appelé Suneung. La réussite dans les études – et dans la vie – est un des points centraux dans la vie des jeunes coréens, poussés par leurs parents à cultiver cette obsession. Cependant, si la Corée du Sud se positionne à la 17ème place dans le classement des pays où il y fait bon vivre (étude effectuée par le Social Progress Imperative), viennent s’ajouter à cette pression de nombreuses autres raisons dans les causes de suicide : le relais d’autres actes similaires dans les médias qui viennent en entrainer d’autres par réaction à ces derniers; le cadre familial fortement touché par la guerre de Corée ayant fait de nombreux orphelins ou encore la situation économique dans un pays certes développé mais où le taux de chômage et le faible niveau de protection sociale peuvent également jouer un rôle important. 

Révélateur de la société actuel, le suicide fait d’autant plus échos chez les célébrités et les idoles de K-pop. Et c’est sans compter sur la hausse de ces cas ces dernières années – et ces derniers mois – où nombreuses sont les stars qui ont témoigné de la dure réalité de leur industrie et de leur société dans des lettres d’adieu adressées à leurs fans, ou sur les réseaux sociaux après avoir subi du cyber-harcèlement. Repérés dès leur plus jeune âge et entrainés sans relâche, ces artistes subissent également beaucoup de pression afin de renvoyer une image en cohérence avec les standards imposés. Une pression d’autant plus remarquable chez les femmes, qui doivent se comporter de manière plus irréprochable que les hommes.

Et conséquence de la crise sanitaire

Mais la hausse du nombre de cas se fait également ressentir en raison de la pandémie du coronavirus qui n’arrange pas la situation. Et c’est encore une fois en partie chez les femmes que cela se fait ressentir, avec un rapport du South China Morning Post qui témoigne d’une explosion des taux de suicides entre janvier et juin 2020. Ces derniers ont augmenté de 40% par rapport à la même période sur l’année 2019. 

Ce sont 296 femmes qui ont eu recours au suicide après avoir perdu leur travail ou parce qu’elles n’ont pas pu bénéficier des aides de l’état. De manière générale, elles sont plus touchées que les hommes par cette crise sur le plan économique, notamment si l’on prend en considération le fait que leur emploi n’ait pas la même valeur et soit jugé « moins important ». Au total, ce sont 617 000 femmes qui ont perdu leur poste contre 401 000 hommes en contre-partie. Et à cela, s’ajoute encore une fois de nombreux cas de harcèlement sexuel au travail et en dehors. 

Aujourd’hui, le nombre de personnes allant consulter des spécialistes dès les premiers signes de dépression et d’instabilité a augmenté ces dernières années en passant de 5% à 20% selon le Centre nationale de santé mentale de Corée. Un chiffre qui accompagne le travail du gouvernement qui a multiplié ses moyens de prévention contre le suicide et qui accorde une place centrale à cette question dans une situation où les répercutions psychologiques sur le peuple coréen sont plus que jamais présentes. 

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